Regards croisés avec Lukas Anker et Cédric Bizet

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Lukas Anker est le Directeur d’ABN AMRO Working Capital Solutions et Président de l’association professionnelle des sociétés d’affacturage aux Pays-Bas. (FAAN). De son côté, Cédric Bizet est Directeur Commercial et de la Relation Clients chez ABN AMRO Asset Based Finance en France. Il a 25 ans d’expérience dans l’affacturage et une excellente vision du marché et de ses perspectives. Découvrez leur interview Regards croisés, dans laquelle ils partagent leurs visions respectives du marché et de leurs écosystèmes, certes différents entre les deux pays mais avec des enjeux comparables pour les entreprises en matière de besoin de solutions de financements flexibles.

LE FINANCEMENT DU BFR : DE QUOI S’AGIT-IL ? POURQUOI EST-IL SI PERTINENT POUR LES ENTREPRISES?

En quoi consiste le financement du BFR ?

Cédric : « Le financement du BFR, c’est un financement qui consiste à adosser le montant financé à la valeur des actifs de votre entreprise. Il en existe différentes formes. Le Financement du poste clients (plus communément affacturage ou factoring) est la forme la plus connue par la plupart des entreprises. Concrètement, vous recevez une avance de fonds dès lors que la facturation a été émise puis transmise à ABN AMRO et ce, sans attendre le paiement de vos clients. »

Pour quel type d’entreprises cette forme de financement est pertinente ?

Cédric : « C’est une solution particulièrement intéressante dans les cas suivants :

  • Les entreprises qui souhaitent se développer

  • Les entreprises dont l’activité est consommatrice de cash

  • Les entreprises qui gèrent des stocks importants ou une chaine d’approvisionnement longue

  • Ou encore les entreprises avec une activité avec une forte saisonnalité. »

Lukas : « Dans toutes ces entreprises, le fonds de roulement ou la trésorerie peuvent vite être sous tension. Grâce au financement de votre BFR, vous vous assurez que c’est optimisé. C’est la raison pour laquelle notre expertise est ancrée autour de la gestion de trésorerie. Les discussions avec nos clients ne tournent pas spécialement autour de leurs résultats financiers, mais plutôt la marge de manœuvre financière et comment elle peut être utilisée de la meilleure des façons possibles. »

POURQUOI LES FINANCEMENTS ADOSSES SONT DE PLUS EN PLUS PERTINENTS ?

Pouvez-vous nous parler de l’émergence des solutions de financement du BFR ?

Lukas : « A l’échelle européenne, le nombre d’entreprises faisant appel aux solutions de financement du BFR a cru rapidement ces dernières années, avec, par exemple une croissance de 10% en 2023 vs 2022. Cette croissance est principalement imputable aux sociétés de services et de transport. La plus forte progression concerne principalement les entreprises avec un CA inférieur à 10 M€, ce qui démontre la valeur ajoutée des solutions de financements du BFR pour les PME. Au premier trimestre 2024, le montant des financements du BFR a significativement baissé comparativement à 2023. »

Cédric : « Le marché français de l’affacturage a cru de près de 10% au cours des 20 dernières années, l’exception de 2020 bien sûr en raison de la pandémie du COVID et des subventions gouvernementales associées et du fort ralentissement de certaines activités. Ce qui illustre que ces dispositifs demeurent une des principales sources de financement des entreprises françaises. Depuis peu, force est de constater que la tendance du marché a significativement changé, avec une croissance à + 1,2% en 2023, une décroissance au 1er trimestre 2024 (-2,6%) et des perspectives similaires dans les mois à venir. »

Comment pouvez-vous expliquer l’engouement pour les solutions de financement du BFR ?

Lukas : « La croissance s’explique parce que les entreprises, qu’il s’agisse de PME ou de multinationales, font appel à ces solutions. On constate un accroissement de la demande pour des solutions sur mesure. Elles sont à la recherche de solutions complémentaires aux prêts traditionnels bancaires. Ce d'autant plus que la hausse des prix des matières premières et l'inflation ont augmenté le volume de liquidités et que le chiffre d'affaires de nombreuses entreprises s'est considérablement accru. Dans pareilles circonstances, un financement flexible vous offre plus d’opportunités. Ce qui joue également un rôle dans la digitalisation des entreprises. Avec une meilleure qualité des données, nous sommes en mesure d’ajuster au jour le jour le financement en fonction des besoins. »

Cédric : « Par le passé, les solutions d’affacturage étaient fortement recommandées pour compenser des lignes bancaires court terme insuffisantes, une sous-capitalisation, un problème structurel, une rentabilité dégradée, un cycle d’exploitation lourd. Mais ce qui est moins connu, c’est que les financements adossés sont extrêmement pertinents pour financer la croissance, une restructuration, des opportunités commerciales, un développement à l’international…. En résumé, les financements adossés sont des solutions alternatives et flexibles pour financer le BFR et différenciantes des autres concours bancaires (qu’ils soient court, moyen ou long terme). »

Et la décroissance constatée en 2024 ?

Lukas : « Le plafonnement de la croissance en 2024 s’explique par deux facteurs. Avant tout, il y a un phénomène de normalisation, de stabilisation après la croissance exceptionnelle de ces dernières années. De plus, les entreprises ne sont plus en mesure d’absorber toutes les liquidités disponibles. Par exemple, en 2023, les entreprises néerlandaises ont été en mesure d’obtenir 8 milliards d’euros de financement via l’affacturage, mais la moitié n’a pas été utilisée. Il y a donc près de 4 milliards de liquidités dorment dans les coffres de la MKB aux Pays-Bas. Il y a bien sûr une explication pour ceci. En effet, les entreprises néerlandaises ont bien performé au cours des 3 dernières années et elles conservent les liquidités disponibles afin de pouvoir les mobiliser à tout moment en cette période incertaine. Elles ne cessent pas vraiment d'investir, mais des événements comme la pandémie de Covid et la guerre en Ukraine les ont rendues plus prudentes. »

Cédric : « En France, la hausse des taux d’intérêts a rendu les solutions de financements adossés moins attractives, notamment pour les produits structurants. Parallèlement les insolvabilités et les liquidations ont fortement augmenté en raison de la fin des aides gouvernementales liées au COVID. Par conséquent, les entreprises cherchent à trouver des alternatives aux financements adossés. Ainsi, en France, en 2023, seulement 32 000 entreprises ont fait le choix des solutions d’affacturage comparativement à plus de 40 000 entreprises il y a quelques années. Ajoutons à cela un contexte géopolitique instable amenant à la plus grande prudence et un certain attentisme en matière de stratégie et d’investissements. »

ABN AMRO COMMERCIAL FINANCE, PRECURSEUR GRACE A SA PLATEFORME DE GESTION UNIQUE

Pourquoi cette digitalisation avancée de vos systèmes est-elle importante pour les entreprises ?

Cédric : "Seuls 3 critères suffisent pour maximiser le financement de nos clients. Premièrement la connaissance des perspectives de développement sur le marché et le secteur d’activité sur lequel ils opèrent. Deuxièmement, des éléments relatifs à la chaine d’approvisionnement du client plutôt que des éléments financiers qui sont l’apanage des financements bancaires traditionnels. Enfin, une vision claire et transparente des données des clients. Chez ABN AMRO Commercial Finance, nous avons entièrement digitalisé cette partie du processus grâce à notre plateforme en ligne, pour laquelle nous avons été les pionniers en Europe. »

Lukas : « Effectivement, l’optimisation de nos systèmes nous permet de maximiser le financement adossé sur les actifs de nos clients. Cela nous permet d’avoir la visibilité sur les factures de nos clients 24h/24 et 7 jours sur 7 et de les financer en conséquence. Ce n’est pas nouveau. Ce qui est nouveau, c’est que nos clients peuvent partager avec nous l’ensemble des données liées à leur chaine d’approvisionnement. Avec un niveau de granularité qui nous permet d’ajuster notre financement au jour le jour. Nous sommes les pionniers au niveau européen et nos clients attendent de nous que nous fassions tout notre possible pour le rester. »

Dans quelle mesure est-il important pour financer le fonds de roulement de vos clients que vous connaissiez bien l’entreprise et son marché ?

Lukas : "Notre point de départ consiste à avoir une vision à 360 degrés de notre client pour être en mesure de maximiser le financement de son fonds de roulement. Nous avons besoin de comprendre quels sont les leviers du marché et quels sont les process."

Cédric : « C’est cette connaissance clients, alliée à l’expertise de nos équipes, qui nous permet d’offrir à chacun de nos clients, une solution de financement sur-mesure, caractérisée par une grande prédictibilité de nos financements et une proximité au quotidien, gage de notre positionnement en tant qu’acteur reconnu pour sa qualité de services PREMIUM. »

REGLEMENTATION, DEVELOPPEMENT DURABLE ET CHAINE D’APPROVISIONNEMENT.

Quels sont les enjeux et les opportunités pour vos clients que vous avez d’ores et déjà identifiés ?

Cédric : "Les réglementations auxquelles les entreprises et nous - en tant que qu’établissements financiers – devrons nous conformer ne vont faire qu’accroitre. Pensez aux lois relatives à la transition vers le développement durable, telle que Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). D’une manière ou d’une autre, chaque entreprise va devoir poser un regard neuf sur sa chaine d’approvisionnement et se poser la question de comment améliorer son empreinte carbone ? Les différents acteurs de la chaine d’approvisionnement vont également devoir faire des choix afin de respecter ces nouvelles règles. Par exemple, opter pour un acteur local ou organiser ses livraisons différemment. En tant qu’entrepreneur, vous avez besoin d’un partenaire financier en qui vous avez confiance, avec des outils solides, une approche agile orientée vers le futur .et qui soit en mesure de vous accompagner dans la transition vers un futur plus durable. "

Dans quelle mesure ces évolutions affectent-elles la chaine d’approvisionnement ?

Lukas : « Chaque process de production et chaque chaine d’approvisionnement a ses forces et ses faiblesses. En cas de changement, plus de trésorerie ou différentes sources de financement est pratiquement toujours nécessaire. Dans de telles circonstances, nous étudions toutes les possibilités avec nos clients. Grâce à la qualité et la durée de nos relations avec nos clients, nous nous assurons qu’ils disposent de toutes les informations nécessaires et ils nous font confiance."

Cédric : "En France, en complément de nos solutions de financement adossés sur les factures de nos clients, nous sommes en mesure de proposer des programmes de Reverse Factoring afin de soutenir l’ensemble de la chaine d’approvisionnement et permet d’optimiser les flux d’achats et développer la fidélité des fournisseurs. C’est un cercle vertueux qui profite aussi bien au donneur d’ordres qu’à ses fournisseurs en leur permettant d’optimiser leur trésorerie.

  • En outre, le donneur d’ordre améliore ses marges, simplifie ses achats et fidélise ses fournisseurs, tout en maintenant une dette d’exploitation.

  • En ce qui concerne les fournisseurs, ils bénéficient d’une garantie de paiement, d’une réduction de leurs encours clients et d’une identification en temps réel des litiges."

CES EVENEMENTS MAJEURS NECESSITENT UN CHANGEMENT DE STRATEGIE ET DE FINANCEMENT

Que recommanderiez-vous aux entrepreneurs en ces périodes incertaines ?

Lukas : « Une entreprise doit s’adapter sans cesse pour réussir. Rester informé des développements à venir, qu’ils soient économiques ou géopolitiques. L’entrepreneur à succès est celui qui anticipe au mieux les nouveautés et ajuste en permanence sa stratégie. De quoi avez-vous besoin en tant qu’entrepreneur ? d’un partenaire financier qui anticipe. »

Cédric : « La PRO-ACTIVITE. Il nous appartient d’être aux côtés de nos clients lorsqu’ils ont besoin de nous. Un entrepreneur a besoin de quelqu’un qui prend le temps de réfléchir avec lui à chaque fois que quelque chose est susceptible d’impacter son entreprise et en particulier sa chaine d’approvisionnement, avec un effet rebond sur son BFR. Qu’il s’agisse d’un événement macro-économique, d’une acquisition ou d’un revers économique, les entreprises sont constamment en mouvement et nous sommes à leurs côtés pour ajuster le financement de leur entreprise en conséquence. Si nous sommes assis à la table des discussions à un stade précoce, nous sommes en mesure de mettre en exergue les conséquences et les risques associés à un événement ou un choix. »

A propos de Lukas Anker

Lukas travaille au sein d’ABN AMRO Asset Based Finance depuis près de 20 ans et est le Directeur Général d’ABN AMRO Working Capital Solutions depuis 2018. « J’ai la responsabilité de 4 équipes, avec un total de 75 collaborateurs. Ils sont en charge des relations avec nos clients. Au cours des vingt dernières années, j’ai eu l’opportunité d’occuper à peu près tous les postes et j'ai toujours pu progresser à grands pas, à la mesure de mon ambition. Pour moi, le financement des fonds de roulement est l'une des solutions de financement les plus intéressantes que l'on puisse offrir en tant que financier. Presque tout ce qui se passe dans le monde affecte nos clients, et donc leur fonds de roulement. J'aime cette dynamique. »

À propos de Cédric BIZET

Cédric Bizet a rejoint ABN AMRO Asset Based Finance depuis près de 7 ans, et occupe la fonction de Directeur Commercial et de la Relation Clients. Encadrant les équipes du Front Office, il incarne les valeurs du groupe auprès du marché et des entreprises françaises. « Mes 25 ans d’expérience en affacturage m’ont permis d’appréhender l’importance que revêt le financement du BFR pour les entreprises. Quelle que soit sa taille ( de la TPE au corporate), et ses besoins de financement, l’accompagnement et la proximité sont des valeurs fortes qui justifient des solutions appropriées et adaptées. Parce que « cash is king », les dispositifs de financement des établissements financiers spécialisés jouent un rôle significatif dans le financement de l’économie réelle aux cotés des établissements bancaires. Notre rôle se renforce au gré des évènements et du contexte pour permettre d’apporter des solutions en phase avec les attentes et les défis des entreprises. »